Alors que dans deux articles hier le Républicain Lorrain a relaté ce qui prend l’allure d’un scandale (du grec σκάνδαλον, skandalon, pierre d’achoppement) avec ce que l’on dit du rapport Altao, j’avais déjà donné mon sentiment et des recommandations au nouveau boss de l’ARS dans un article en date du 24 décembre 2012 après la fuite dans la presse d’éléments du rapport et il apparaît que c’est pire encore avec ce qui se dit en ce début février 2013 quelques semaines plus tard.
Ce qu’on pouvait déjà dire en décembre 2012 du rapport Altao
Comme je le relevais, le site internet de l’ARS Lorraine ne parle pas de la mission ALTAO avant une conférence de presse du 28 novembre 2012 du prédécesseur de Claude d’Harcourt.
L’ARS a eu beau démentir et préciser que l’expertise Altao propose des pistes de réflexion qui n’engagent que le consultant et ne préjuge pas des décisions qui seront prises par l’ARS le moment venu en fonction du dialogue avec les communautés médicales et les organisations syndicales, on ne pouvait être que choqué par le recours à un cabinet privé sans transparence :
- quid du choix d’un cabinet privé : les services de l’Etat sont-ils médiocres au point de ne pouvoir produire une telle étude (quand on voit le comportement de certaines personnes de l’IGAS par exemple, il n’est pas interdit de le penser) ?
- quid du coût ?
- quid d’un appel d’offres pour la réalisation de cet audit ?
- quid de l’association des acteurs à la discussion pour la validité des préconisations ?
Les questions de bon sens que je posais naguère ne sont pas exhaustives. Et j’appelais le nouveau boss de l’ARS (Claude d’Harcourt) à faire le ménage dans son administration et engager toutes les responsabilités de ceux ayant ou ayant eu le pouvoir de direction et/ou de décision dans les établissements publics comme privés, lui ayant même écrit (20121231 Lettre DG ARS Lorraine) pour lui transmettre la copie de ma lettre ouverte à Jean-Claude Kneib (20121231 Lettre JC Kneib), directeur des hôpitaux de Sarreguemines, comme je l’ai fait aussi pour Marisol Touraine ministre de la Santé.
Le scandale
Peu de temps après une rencontre de Claude d’Harcourt avec les syndicats qu’il n’a pas convaincus, le scandale est venu par un dossier titré « SANTÉ INDIGNATION DANS LES HÔPITAUX DE FORBACH ET SARREGUEMINES » paru le 1er février 2013 dans le Républicain Lorrain avec deux articles : « L’audit se moque de l’accent des médecins de Moselle-Est » et « Altao : ‘Ce n’est pas notre rapport’ »
Le premier article apprend qu’une version de l’audit conduit sur les hôpitaux de Moselle-Est par le cabinet Altao fait scandale car on trouve dans le document de 33 pages des notes sur l’accent et l’origine étrangère de médecins, notamment un chirurgien de Forbach qui parle de saisir un avocat. Cité par le journal le chirurgien mis en cause précise « Altao ? Je n’ai jamais parlé avec eux. En fait, il y a beaucoup d’imprécisions, de chiffres erronés dans ce document ». Le président d’Altao a démenti vigoureusement être l’auteur de ce travail, surmonté de l’entête de son cabinet
Dans le second article daté du 1er février 2013, il est question des relations entre Altao, qui dément les propos du rapport, et l’ARS qui se désolidarise de ce rapport. Citée par le journal, l’Agence Régionale de Santé, qui ne dément pas les propos controversés, a précisé que « les commentaires rédigés dans ce rapport n’engagent que le consultant », et qu’elle n’est « pas responsable de la diffusion d’un tel document. Tout jugement personnel qui serait émis dans ce rapport n’est évidemment pas approprié ». Le second article relève à la fin que l’ARS ne veut pas communiquer le prix du rapport pour lequel il serait intéressant de voir l’appel d’offres.
Le lendemain, samedi 2 février 2013 le député-maire de Sarreguemines est entré dans le débat en estimant que « Altao s’est discréditée ». Le député-maire est président du Conseil de Surveillance de l’Hôpital de Sarreguemines et auparavant était président du Conseil d’Administration antérieurement à la loi HPST.
Mais, à la différence de son homologue PCA d’un établissement privé de type associatif, il n’est pas le hiérarchique du directeur : c’est l’ARS, qu’il semble défendre (cité par le journal il dit « ses rédacteurs n’ont pas saisi l’importance stratégique de l’orientation définie par l’ARS »), alors que ce rapport très perfectible est le résultat de mauvais choix de l’ARS : choix du consultant, choix du secret de la mission…
En conclusion, les problèmes hospitaliers de Moselle Est restent entiers. Ce n’est pas tant Altao qui pose problème que l’ARS en général, qui a manqué de réaction voire de neutralité dans l’exercice de ses missions de service public tant à l’égard des établissements publics que des établissements privés (elle n’a pas fait respecté la loi comme elle le devait en particulier à la délégation territoriale de Moselle), voire pour la Moselle a eu recours dans des conditions manquant totalement de transparence à un cabinet privé ignorant manifestement le terrain pour faire des recommandations sans aucune vision de gouvernance et de respect des parties prenantes.