L’ancien ministre Christian Eckert n’est pas content de son ex collègue Emmanuel Macron et le fait savoir dans un livre (Un ministre ne devrait pas dire ça… , publié aux éditions Lafont) et des interventions assassines dans les médias.
Et d’employer ainsi les mots « Machiavel », « pervers » pour revenir sur les conditions de la préparation d’Emmanuel Macron à sa candidature victorieuse.
Disons-le tout de suite, ce qui s’est passé aurait sans doute justifié un licenciement pour faute lourde dans une entreprise privée dès lors qu’il apparaît une déloyauté d’Emmanuel Macron à l’égard de sa hiérarchie, ce que souligne la présentation du livre : Il nous dévoile les secrets inavouables de la mutation du ministre de l’Économie en candidat (…), double jeu du futur président.
Et te taxer Emmanuel Macron de « président des riches qui veut sacrifier les bijoux de l’État au profit de la finance » précise encore la présentation du livre.
A titre liminaire, la tentative de Christian Eckert d’exonérer la responsabilité de ceux qui ont laisser faire Emmanuel Macron (« On peut toujours dire que le coupable c’est celui qui s’est fait abuser, ou c’est celui qui a abusé« , s’est-il interrogé sur le plateau de BFM. « Il y a peut-être eu un peu de naïveté d’un certain côté, mais de l’autre il y a une volonté affirmée et dissimulée pendant longtemps« ) ne tient pas la route avec un président qui a laissé passer des profils comme Jérôme Cahuzac, Thomas Thevenoud, auteur d’un livre, ou encore Aquilino Morelle également auteur d’un livre. Nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude.
Il ne s’agit pas dans cet article de dire si la politique gouvernementale est bonne ou mauvaise mais de la remettre en perspective.
Tout d’abord, le quinquennat de François Hollande, en tout cas de manière marquée avec manuel Valls Premier Ministre à partir du , a servi de marchepied à celui d’Emmanuel en faisant primer le business sur la morale favorisant ainsi les riches et très riches. Cela avait été prophétisé avant même l’élection de François Hollande dans une note de Nicolas Doisy lorsqu’il travaillait à Chevreux ; il a expliqué verbalement son sentiment dans l’émission Là bas si j’y suis de France Inter le mercredi 11 avril 2012 :
Les réformes sous prétexte de compétitivité (baisse de charges et/ou baisse de la fiscalité) du code du travail vers la flexibilité (loi Sapin sous Jean-Marc Ayrault premier ministre ; loi Rebsamen, Loi Macron, Loi El Khomri sous Manuel Valls Premier Ministre) … outre qu’elles ont créé la confusion pour les justiciables (péremption, prescriptions…) ont été menées sans veiller à ce que le corollaire soit d’une part la sanction à l’égard des employeurs qui dévoient le pouvoir hiérarchique et disciplinaire et d’autre part un partage sain et équitable de la valeur ajoutée (la réalité est que des dividendes toujours plus élevés en France, comme l’a montré l’étude récente l’ONG Oxfam, sont distribuées et cela même dans des entreprises en déficit ce qui est une aberration) ….
Cette carence sociale de la part d’un gouvernement dont le chef Manuel Valls a dit aimer les entreprises invalide tout sérieux des critiques par le parti socialiste sur l’action du gouvernement actuel, qui est dans la la continuité de celui de François Hollande.
Ensuite Christian Eckert évoque la composition du Conseil Constitutionnel davantage politique que juridictionnelle, ce qui qui aurait conduit l’exécutif à s’autocensurer sous François Hollande et conduit à des décisions incomprises comme celle de son opposition au reporting par pays l’ayant conduit à recevoir la casserole d’Anticor :
Je ne partage pas l’argument de la peur de sanction par le conseil constitutionnel, qui est le même employé par Nicole Beloubet pour s’opposer à l’exigence de casier judiciaire vierge des élus quand une telle exigence est posée pour les fonctionnaires et de nombreux métiers. Et alors ? Je crois qu’il vaut mieux être censuré par le conseil constitutionnel organe politique que s’autocensurer. Je pense que le contribuable comme l’entreprise lambda n’en déduira pas que la loi ou, pire, les politiques ne peuvent pas – voire ne veulent pas – prendre des mesures novatrices, bien au contraire : ce sera bien le conseil constitutionnel actuel dont composition politique conduisant au conservatisme sera regrettée.
A titre personnel je pense qu’une émanation du Conseil d’Etat et de la Cour de Cassation, donc de ceux-là même au sein de la justice administrative et la justice judiciaire qui doivent appliquer les loi serait plus sereine pour le contrôle de constitutionnalité, pourquoi pas par tirage au sort parmi les hauts magistrats de l’ordre administratif et de l’ordre judiciaire…
Enfin Christian Eckert soulève la question des carences de l’Union européenne. Les questions qui viennent à l’esprit sont:
- qui a entériné en 2014 le président de la commission et les commissaires actuels ?
- qui a maintenu en 2018 le président de la commission et les commissaires actuels après l’affaire Selmayr ?
- qui a voté des textes dont la mise en oeuvre est controversée en France : directive secret des affaires, concurrence du rail… ?
Il est peu probable qu’Emmanuel Macron obtienne des avancées car les intérêts sont trop divergents entre l’Allemagne et les autres pays membres de la zone Euro, entre les Pays du Nord et les Pays du Sud de l’Europe, entre les pays de l’Ouest et es pays de l’Est de l’Europe.
Emmanuel Macron pratique la théorie des jeux pour avancer ses réformes foncièrement libérales qui émeuvent aujourd’hui des économistes qui avaient été à ses côtés : Philippe Aghion, Philippe Martin et Jean Pisani-Ferry déplorent ainsi « l’image d’un pouvoir indifférent à la question sociale ».
Son élection brillante face à la nullité des partis de gouvernement, d’où sont toutefois issus des arrivistes aux dents longues de son entourage, et la réussite de son mandat postulaient que la réforme de l’Union Européenne dont il s’est présenté en héraut se ferait, ce qui est largement compromis par les votes récents dans des pays membres et par le constat des intérêts divergents croissants.
Il est sans doute imprudent de sa part d’humilier les Français (ceux qui ne sont rien, fainéants, illettrées…) qui auront toutes les raisons de vouloir essayer les idées des populistes lors des prochaines élections d’autant qu’il ne pourra plus compter sur nombre de marcheurs de terrain, petites mains déçues, et que PS comme LR ne pourront être une alternative.