Dans un article paru dans la Harvard Business Review, Andy Molinsky explique les difficultés du management multiculturel.
Il prend en exemple le cas de Ron Bradley, qui avait l’habitude de programmer des sessions trimestrielles de feedback avec les membres de l’équipe mais s’est trouvé confronté à un sentiment de déconnexion avec les employés – en particulier ceux nés à l’étranger – ce qui l’a mis dans une position très inconfortable et gênante en tant que mentor.
En tant qu’associé principal d’une prestigieuse société de conseil internationale, il était reconnu qu’il pouvait être intimidant pour les collègues plus jeunes, et il avait été pris pour priorité de faire tomber les barrières. Il était demandé à tout le monde de l’appeler par son prénom plutôt que par son titre officiel. La politique de la porte ouverte était pratiquée : au lieu de prendre un rendez-vous officiel pour discuter, il était encouragé de frapper à la porte. En fait, il y avait toujours une occasion de bavarder avec les employés de manière décontractée et détendue, sur le temps qu’il faisait, la famille de chacun, l’événement sportif de la nuit dernière ou tout autre sujet pertinent. Enfin, chacun était exhorté à « dire ce qu’il pense » lors des réunions d’équipe et des séances de remue-méninges – à débattre, à discuter et à remettre en question les idées, quelles qu’elles soient (même celles du mentor).
Mais rien de tout cela ne fonctionnait avec les employés d’origine étrangère, en raison des particularités du management multiculturel. Il y avait une politesse et un travail acharné indéniables. Mais lorsqu’il s’agissait d’établir une relation et de se connecter à un niveau personnel, une distance et un désintérêt complet étaient observés. Cette situation était particulièrement frustrante et décevante, compte tenu de tous les efforts déployés, et l’intention d’en discuter lors de chaque réunion d’évaluation des performances était prise.
Cette histoire n’est pas unique ; en fait, dans le cadre du travail sur les défis de l’adaptation culturelle depuis une dizaine d’années, de nombreux cadres ont exprimé leurs frustrations à établir des liens avec leurs employés étrangers. Des discussions avec des employés nés à l’étranger ont également révélé des frustrations similaires.
Prenons, par exemple d’une situation de management multiculturel, le cas d’un jeune consultant camerounais travaillant aux États-Unis pour une grande entreprise internationale. Au Cameroun, les relations avec les aînés, y compris avec le patron, sont très hiérarchiques. Dès l’enfance, il a été appris à « parler quand on lui parle » et à « être vu mais pas entendu ». C’était vrai à la maison, à l’école et au travail. Au Cameroun, il ne serait jamais envisagé de causer avec son patron, de frapper à sa porte pour discuter ou, Dieu vous en préserve, de contester ce qu’il dit lors d’une discussion de groupe. Pourtant, ce sont les mêmes choses qui devaient être faites pour réussir dans l’entreprise – tout comme les subordonnés de nombreux mentors.
De nombreux cas similaires ont été observés : des managers ne parvenant pas à établir des liens avec leurs employés étrangers, et des employés ne parvenant pas à établir des liens avec leurs patrons. Cette situation peut être source de confusion, d’anxiété et de frustration pour toutes les parties concernées. Et pour l’entreprise, c’est une occasion manquée de tirer parti des avantages d’un lieu de travail multiculturel. Alors, que peut être fait en tant que manager pour mieux communiquer avec des employés d’origine étrangère ?
La première chose à faire est de faire preuve d’empathie. Faire preuve d’empathie à l’égard des expériences des employés nés à l’étranger peut contribuer grandement à établir un lien avec eux. Par exemple, il s’agit de comprendre que les efforts bien intentionnés visant à « faire tomber les barrières » ne fonctionneront pas aussi facilement ou rapidement avec des employés venant de cultures où il est tout simplement impossible d’établir un lien personnel avec un patron.
Ensuite, si l’on n’a jamais vécu ou travaillé à l’étranger, il est recommandé de se renseigner sur les différences culturelles et sur les défis de l’adaptation culturelle. Discuter avec une personne de sa liste de contacts issue de cette culture, mais peut-être plus acculturée que l’employé, pourrait être une mine d’informations et même devenir un mentor pour l’employé.
Bien que cela puisse prendre du temps, il est possible de développer des relations avec des employés d’origine étrangère. Rechercher des centres d’intérêt communs – comme un hobby, un sport ou une autre activité qui transcende les différences culturelles – est une approche recommandée. Par exemple, un cadre américain a noué d’excellentes relations avec ses employés canadiens grâce à leur intérêt commun pour le hockey, un sport peu connu au départ, mais apprécié par la suite. Il est conseillé d’être patient dans les efforts de rapprochement et de ne pas attribuer à tort un manque de connexion – surtout au début – à un manque d’intérêt. Il faut du temps et des efforts pour adapter son comportement, surtout lorsqu’il s’agit de communiquer avec des personnes d’autorité. Imaginer à quel point il serait mal à l’aise de devoir changer complètement sa façon de communiquer avec des personnes d’autorité, surtout si ce style est ancré depuis la jeunesse, aide à comprendre la situation des employés étrangers.
Pour réussir son management multiculturel, faire preuve de patience lors du développement de relations avec des employés d’origine étrangère portera ses fruits. Ce n’est peut-être pas toujours facile, mais l’établissement de relations avec les employés peut s’avérer très bénéfique. Garder le cap et, en peu de temps, les fruits d’un lieu de travail multiculturel seront récoltés.
Rédaction : Elynn GUALTIERI (BTS SAM)
Vérification : Jérôme TURQUEY