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Corruption des juges en France : le problème des Prud’hommes

Corruption des juges en France : le problème des Prud’hommes

Il n’est pas évident pour le justiciable de détecter un conflit d’intérêt, surtout caché, au Conseil de Prud’hommes quand ce n’est pas un problème de corruption en France.

Certes des mécanismes existent pour garantir l’impartialité. Ils ont été décrits dans une étude de la Cour de Cassation (Cour de Cassation, « Étude : L’impartialité de la juridiction prud’homale », Mensuel du Droit du Travail, N° 61, Janvier 2015, pp 3-20).

Mais le risque a été pointé par le GRECO.

Il demeure qu’en pratique des conseillers côté employeur comme côté salarié peuvent ne pas se déporter spontanément d’un dossier quand ils le devraient.

Prenons un exemple concret bien réel.

Le cas de conflit d’intérêt

Un conseiller a été DRH d’une entreprise où Mr Y était Directeur Général. Tous deux sont conseillers prud’hommes employeurs, Mr Y sans la section industrie, Mr X dans la section de l’encadrement.

Mr Y est par ailleurs trésorier d’une association avec des salariés.

Mr Z, cadre membre du CE licencié, a esté devant la section de l’encadrement du Conseil de Prud’hommes.

Plusieurs griefs peuvent être formulés contre Mr Y par Mr Z à raison de ses fonctions de trésorier dirigeant de droit,  même si le président de la juridiction informé et le Ministère de la Justice saisis n’ont rien trouvé à redire au plan déontologique.

Mr Y, qui a été solidaire de toutes les décisions du Conseil d’Administration dont il n’a pas démissionné, a

  • entériné une éviction sur un poste de salarié protégé supprimé (le poste et le salarié) sans vouloir de reclassement au mépris de la loi et la jurisprudence,
  • entériné le non-respect du droit du travail et du droit de la sécurité sociale notamment après de la violence provoquée, qu’il a fallu plusieurs années à faire reconnaître, sur un salarié protégé et contre laquelle il n’a rien fait,
  • entériné le rapport de force sur la loi en cautionnant le refus de réparation

Les faits qui peuvent motiver l’une des mesures disciplinaire à l’encontre d’un conseiller prud’homal ne sont pas seulement ceux qui auraient été commis dans l’exercice même de fonctions juridictionnelles ou d’administration du conseil de prud’hommes, mais aussi ceux qui, commis en dehors de ce cadre, révèlent un comportement incompatible avec les qualités attendues d’une personne investie de la fonction de juger et qui sont susceptibles de jeter le discrédit sur la juridiction à laquelle elle appartient et doivent, dès lors, être regardés comme des manquements graves. Ainsi par exemple une complicité  de  discrimination  syndicale est-elle pour le Conseil d’Etat (CE, N°332451, 20 mai 2011) un  comportement incompatible avec  les  qualités  attendues  d’une personne  investie  de  la  fonction de  juger,  en  particulier  ses  obligations  de  neutralité  et  d’impartialité, et qui sont susceptibles de jeter le discrédit  sur  la  juridiction à laquelle il appartient.

L’information que Mr Y est trésorier de l’association est publique : il y a eu des articles de presse le citant à ce titre ; Mr X et Mr Y sont en outre tous deux membres du collège employeur de la juridiction.

Le président de la juridiction informé sur le cas de Mr Y par Mr Z aurait dû faire déporter d’entrée Mr X du dossier (pastille, post-it… pour signaler le problème d’impartialité)

J’aurais été Mr Y, informé nécessairement du litige, j’aurais alerté Mr X pour qu’il se déporte du dossier.

L’analyse

L’association est administrée par un conseil d’administration.

)Il existe entre le juge –conseiller Prud’hommes – et un des élus au Conseil d’Administration – le trésorier – qui a donc un intérêt certain au litige, un lien de subordination. Sous réserve de dispositions particulières à certaines juridictions, la récusation d’un juge peut être demandée s’il existe un lien de subordination entre le juge ou son conjoint et l’une des parties ou son conjoint (Cf. article L111-6 du Code de l’Organisation Judiciaire applicable en vertu des dispositions de l’article R 1457-1 du Code du Travail). C’est ce que rappelle la Cour de Cassation (Cass. Soc., 27 janvier 2009, N°07-42967

(…) en vertu de l’article 6. 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal indépendant et impartial ; que cette exigence implique qu’un conseiller prud’homme qui a été sous un lien de subordination avec l’une des parties et qui a été le supérieur hiérarchique de l’autre, éléments de nature à faire naître dans leur esprit un doute légitime sur son impartialité quelle qu’ait été la qualité de ses relations avec l’une et l’autre, ne fasse pas partie de la formation de jugement.

Mr Z a demandé personnellement la récusation de Mr X en raison d’un lien de subordination passé, étayé par des sources officielles et professionnelles publiques à défaut de pouvoir produire des documents de l’entreprise.

Mais Mr X a refusé de se déporter du dossier et a nié tout lien de subordination actuel mais en éludant le lien passé avéré qu’il n’a pas nié.

Il aurait dû se déporter spontanément du dossier en vertu de l’article 339 code de procédure civile qui dispose que le juge qui suppose en sa personne une cause de récusation ou estime en conscience devoir s’abstenir se fait remplacer par un autre juge que désigne le président de la juridiction à laquelle il appartient. Il ne l’a pas fait.

La demande de récusation a donc été transmis à la Cour d’Appel.

 

Source : https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Scale_of_injustice.svg

Jérôme: Jérôme se propose d’aider les organisations à mettre en œuvre les bonnes pratiques de management et de gouvernance pour une prévention pragmatique des risques. Il a notamment développé une méthode d’analyse pertinente des dysfonctionnements avérés de management que révèle toujours l’implication de toute entreprise dans du contentieux voire du précontentieux pour en tirer des préconisations d’amélioration de l’organisation en complémentarité des professionnels avec lesquels l'entreprise travaille (avocats, experts comptables, notaires, assureurs...)..
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