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Retour à l’équité pour les employeurs

 

Une balance de la justice plus équitable pour les entreprises de bonne foi.

Il est évoqué ci-après sous l’angle du management quatre décisions récentes de la Cour de Cassation commentées par Me Virginie Langlet dans un article de juritravail.com titré « Clap de fin pour la réparation automatique du préjudice du salarié en cas de manquement de l’employeur [1]« , complémentaire à son autre article titré « Harcèlement moral : vers la fin de l’obligation de sécurité de résultat pesant sur l’employeur [2]« .

Il s’agit d’un retour à l’équité pour les employeurs.

…attendu que l’existence d’un préjudice et l’évaluation de celui-ci relèvent du pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond ; que le conseil de prud’hommes, qui a constaté que le salarié n’apportait aucun élément pour justifier le préjudice allégué, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision… [cas de non-délivrance ou la délivrance tardive des certificats de travail et bulletins de paie].

Dans cet arrêt du 13 avril 2016 (Cass. soc, 13 avril 2016, N°14-28293 [3], Publié au bulletin), la Cour de cassation ne suit pas le salarié qui affirme que que la non-délivrance ou la délivrance tardive des certificats de travail et bulletins de paie cause nécessairement un préjudice que le juge doit réparer, le salarié n’ayant pas à en prouver la réalité. Elle revient sur sa position qui avait reconnu naguère le 17 septembre 2014 le préjudice pour remise tardive des documents.
Il demeure que, par respect pour le salarié, la remise des documents doit être faite avec diligence voire qu’un retard pourrait s’inscrire dans des agissements de harcèlement moral reprochés par le salarié.

…attendu que l’existence d’un préjudice et l’évaluation de celui-ci relèvent du pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond ; que la cour d’appel a relevé que la salariée, qui occupait un poste de cadre administratif et détenait la moitié du capital social de la société employeur, était en mesure de connaître la convention collective applicable et d’en vérifier l’application et qu’elle ne démontrait pas l’existence d’un préjudice…

Dans cet arrêt du 17 mai 2016 (Cass. soc, 17 mai 2016, N°14-21872 [4]), la Cour de cassation ne suit pas le salarié ayant demandé des dommages-intérêts pour défaut d’information sur la convention collective applicable bien qu’il s’agisse d’une mention obligatoire du bulletin de paie. Ce qui est intéressant est que la Cour intègre explicitement dans son raisonnement les qualifications et le statut de la salariée faisant qu’elle ne pouvait sérieusement ignorer l’information de la convention collective indépendamment de l’existence non démontrée d’un préjudice.
Il n’est pas certain qu’une telle solution serait appliquée à un salarié sans qualifications car il y a bien un cumul dans le raisonnement de la Cour : connaissance ET préjudice.

…attendu, d’abord, que la sécurité juridique invoquée sur le fondement du droit à un procès équitable prévu par l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme, ne saurait consacrer un droit acquis à une jurisprudence immuable, l’évolution de la jurisprudence relevant de l’office du juge dans l’application du droit ; Attendu, ensuite, qu’ayant constaté que l’employeur, informé par le salarié, qui n’avait pas manifesté la volonté de ne pas reprendre le travail, de son placement en invalidité 2ème catégorie en janvier 2006, ne l’avait convoqué que le 4 novembre 2010 à une visite médicale de reprise et exactement retenu qu’il appartenait à l’employeur d’organiser la visite de reprise, la cour d’appel a pu décider qu’en tardant plus de quatre années pour organiser cette visite, l’employeur avait commis une faute engageant sa responsabilité et a souverainement apprécié le préjudice subi par le salarié…

Dans cet arrêt du 17 mai 2016 (Cass. soc., 17 mai 2016, N°14-23138 [5]), la Cour de cassation souligne bien que la jurisprudence est évolutive et n’est jamais acquise. C’est la raison pour laquelle il est déconseillé de s’appuyer sur une solution jurisprudentielle pour justifier ses actions en management et direction d’entreprise : il n’y a pas de droit acquis par une jurisprudence et les textes législatifs et réglementaires sont tellement mal écrits que le juge doit trop souvent interpréter.
Là encore, le préjudice subi par le salarié est à prouver. Il est souverainement apprécié par les juges en premier ressort (Prud’hommes) et en second ressort (Cour d’Appel).

…attendu que l’existence d’un préjudice et l’évaluation de celui-ci relèvent du pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond ; que la cour d’appel, ayant constaté que le salarié n’avait subi aucun préjudice résultant de l’illicéité de la clause de non concurrence, le moyen ne peut être accueilli…

Dans cet arrêt du 25 mai 2016 (Cass. soc, 25 mai 2016, N°14-20578 [6], Publié au bulletin), la Cour de Cassation ne suit pas le salarié qui invoque une clause de non-concurrence nulle qui causerait nécessairement un préjudice au salarié dès lors que le salarié a exercé, après la rupture de son contrat de travail, l’activité interdite par la clause. Il en ressort le sentiment d’un salarié de mauvaise foi dont la prise d’acte a été qualifiée de démission qui a voulu profiter des règles de réparation automatique en vigueur jusque là.

Derrière ces affaires, il faut voir non une régression pour les salariés mais un progrès dans la loi de travail pour les employeurs de bonne foi …

Retour à l’équité pour les employeurs [7]

Source : https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Cour_de_Cassation,_entr%C3%A9e_par_le_Palais_de_Justice.JPG