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Les limites des critiques contre l’employeur

La presse s’est peu fait l’écho de l’autorisation donnée par le ministère du travail courant juillet de licenciement d’un syndicaliste de la RATP en pointe dans la dénonciation du harcèlement moral et sexuel.

En plein débat sur une nouvelle loi réprimant le harcèlement sexuel et protégeant les témoins alors que les dispositions de répression du harcèlement moral viennent d’être confirmées, cette affaire d’autorisation de licenciement, malgré un contexte de harcèlement moral et sexuel, mérite que l’on s’y attarde.

A l’origine de la demande de licenciement à l’inspection du travail, plusieurs prises de positions publiques dans les média (RV, radio) et surtout un blog dont sont reproduits (fautes d’orthographes, majuscules et coquilles incluses) quelques extraits choisis ci-dessous auxquels on ne peut souscrire sur le fond comme sur la forme:

– « SAGLIER, RICHY ET ESLAN COMME LE SLOGAN DES PAYS ARABES DEGAGES » (25 août 2011)

– « SAGLIER le directeur du département à la RATP est un gros menteur quand il parle de l’enquête de la RATP. J’ai écrit au PDG et à ses adjoints pour dénoncer la complicité en matière de magouille dans le département ou sévices le roi ESLAN sans que nous n’ayons été contacté par l’enquêteur Fantôme. C’est encore plus surprenant d’autant que la lettre du corbeau mentionne notre nom comme témoin. SAGLIER est une personne psycho rigide qui ne supporte pas la contradiction et le dialogue social cela doit être à sens unique et c’est pour cela que le roi Eslan un bon opportuniste soumis pouvait avoir grâce à ses yeux ». (28 aout 2011)

– « Les magouilles qui touchent le département sem sous la direction de monsieur Saglier sont nombreuses et le PDG n’a pas voulu répondre à mes courriers ni ses collaborateurs car le sport numéro 1 dans l’entreprise c’est le silence. Cela me fait penser à la franc maçonnerie ou les apprentis n’ont pas le droit de parler mais il y a une différence avec la direction de la ratp c’est qu’ils sont payés et bien payés ce qui ne leur donne pas l’obligation de silence ». (29 août 2011)

– « Il a décidé enfin de sortir du silence mais comme dans son sport favori le mensonge et la victimisation. Il est tellement bête qu’il vient de faire la démonstration qu’il est copain comme cochon avec la direction puisque les premières déclarations de la direction de la RATP sont exactement les mêmes que lui ». (5 septembre 2011)

– « Eslan tu fais encore diversion pour échapper à ton destin mais tu ne vas pas endormir les salariés de la RATP qui sont nombreux soulagés que l’on balance ton système avec Saglier » (5 septembre 2011)

– « LA DIRECTION DE LA RATP PREFERE LES VOLEURS , LES HARCELEURS ET MENACE, SANCTIONNE CEUX QU’ILS VEULENT LA JUSTICE. »  » LE COURAGE C’EST FAIRE CE QUI EST JUSTE ALORS QUE D’AUTRES PREFERENT SE CACHER CELAME RAPPEL ETRANGEMENT VICHY ». (8 octobre 2011)

– « Nous avons prévenu que l’ensemble du conseil de discipline sera poursuivi au pénal mais pour eux ce n’est pas grave car à la fin de l’année ils vont pouvoir chercher leur petit os avec Saglier pour une belle augmentation pour service rendu ». (11 novembre 2011)

– « Cette demande de licenciement… J’en ris…Il n’y a rien dans le dossier (…) Mme Nathalie Isler, qui a voulu s’inscrire dans cette plainte avec Mr Eslan, devra en payer les pots cassés (…) Je rends public son nom (…) C’est dans mon action de syndicaliste que je m’exprime sur le blog… Dans les prochains procès contre la RATP cela aura aussi son importance » (vidéo du 21 novembre 2011)

L’inspection du travail a refusé le licenciement par décision du 7 février 2012 : tout en notant des propos excessifs (« en dépit du peu de précaution oratoire ») elle ne lui en a pas tenu rigueur pour s’en tenir à la protection accordée par la loi aux victimes et aux témoins de harcèlement.

Le syndicaliste aurait dû laisser les procédures devant la justice suivre leur cours, au lieu d’être triomphant exprimant son animosité.

Cela avait pourtant bien commencé par une vidéo relativement pondérée du 9 février 2012 appelant à ce que « la raison l’emporte » pour commenter la décision de l’inspection du travail mais passant sous silence que l’inspection du travail avait noté son « peu de précaution oratoire » car il n’a pas fait que relater les faits, et c’est bien là le problème.

Très vite, dès le 14 février 2012, il a recommencé les mises en causes sur son blog, ce qui ne pouvait qu’incliner l’entreprise à réagir

– « François Saglier veut absolument que je dégage avec la bénédiction de Pierre Mongin qui lui a donné le feu vert pour mobiliser le personnel du service juridique, les ressources humaines et un le cabinet d’avocat August et Debouzy qui est un des plus chère sur le marché » (14 février 2012)

– « ils ont encore repris mes derniers éléments sur mon blog sur les sujets que je traite en qualité de responsable juridique et communication de mon syndicat » (17 février 2012)

– « La Direction cherche des éléments sur ce blog, dans ma vie privé, sans compter la campagne de dénigrement. » (27 février 2012)

– « ‘Embrouille’, la Direction de la RATP » (Vidéo du 2 avril 2012 ridiculisant la direction)

– « LE PDG de la ratp protège le mis en cause dans l’affaire du harcèlement et attaque le syndicaliste qui défend les victimes. il a demandé au ministre d’annuler la décision de l’inspectrice du travail en validant le licenciement du responsable juridique et communication du SATRATP. Eslan dit le roi fait un faux témoignage pour défendre le dossier de la direction de la RATP. Pendant ce temps les victimes n’ont eu droit à aucune protection et sont conternées de voir Eslan sans sanction alors qu’elles ont déposé plainte. LE ROI CONTINU DE REIGNER AVEC SES AMIS DE LA DIRECTION FAUT IL ETRE MIS EN CAUSE DANS UNE AFFAIRE D’HARCELEMENT POUR ETRE PROTEGE ? LA DIRECTION A PEUR QU’ESLAN BALANCE LEUR ALLIANCE. LES SYNDICALISTES QUI PROTEGENT LES VICTIMES ET DENONCENT L’HARCELEMENT SONT DES CIBLES POUR LES DIRECTEURS FRANCOIS SAGLIER ET PIERRE MONGIN « (21 avril 2012)

– « Eh bien justement les risques pénal il va les avoir puisque je vais déposer plainte pour faux témoignage à l’encontre de Mr Eslan qui n’est plus à une procédure près (…) La RATP ne veut pas changer une équipe qui perd (…) méthode crapuleuses » (video du 21 avril 2012)

Suite au recours hiérarchique, le ministère a autorisé le licenciement. Interrogé le ministère a précisé « L’autorisation de licenciement a été accordée parce qu’une enquête contradictoire a été menée. Elle a permis de constater que des propos virulents et injurieux ont été tenus sur un site internet qui ont dépassé le cadre de la liberté d’expression et ont porté atteinte à l’entreprise » (cité dans l’article du blog du 20 juillet 2012)

Et notre syndicaliste de réagir :

– « Le Ministre est aussi menteur, car dire que je n’ai rien dénoncé en qualité de syndicaliste, lorsqu’on on voit les articles et les reportages qui me présentent comme syndicaliste, cela devient grossier une telle mauvaise foi » (18 juillet 2012)

– « Vous pouvez faire fonctionner la démocratie des internautes en reprenant cet article avec le nom de François Saglier comme cela il sera fiché sur Google » (27 juillet 2012)

– « Vous êtes tellement prévisible que je connaissais la faute d’avance (…) Je vous invite à déposer plainte pour diffamation et on verra qui est le menteur (…) Je dispose d’enregistrement ou Monsieur Manconne et Cazal affirment être étranger à cette procédure et sans hésitation vous désignent comme l’auteur. Cette pièce n’est pas recevable au prud’homme mais en revanche au pénal c’est accepté dans les dossiers de harcèlement alors comme vous ne payez pas vos avocats, vous pouvez vous renseigner » (30 juillet 2012)

– « J’ai sur mon blog seulement relayé ses faits et on est loin d’être dans la mauvaise foi car chaque dénonciation a fait l’objet d’un dépôt de plainte avec ouverture d’une enquête préliminaire par le parquet » (4 août 2012)

– « l’argent public versé à la RATP détourné par la direction pour organiser le harcèlement» (14 août 2012)

– « Le Ministre Sapin a oublié que la loi protège aussi ceux qui dénoncent la corruption et les magouilles financière au même titre que le harcèlement » (18 août 2012)

– « C’est seulement un extrait de leur mensonge et de leur méthode de BARBOUZE , DE DELINQUANT ET DE CRAPULERIE AVEC L’ARGENT PUBLIC , NOTRE ARGENT » (7 septembre 2012)

Pourquoi le syndicaliste, bien qu’il s’en défende, ne s’est-il pas contenté de signaler des faits délictuels présumés aux autorités administratives et judiciaires voire au défenseur des droits (la RATP est un service public) au lieu de traduire une animosité et une arrogance dans ses propos publics répétés aussi bien par écrit que filmés avant le licenciement comme après ?

Dans son article du blog du 4 août 2012 il cite lui-même l’article L. 1161-1 du Code du Travail, dont il se réclame, qui accorde explicitement une protection à ceux qui ont « relaté ou témoigné, de bonne foi, soit à son employeur, soit aux autorités judiciaires ou administratives, de faits de corruption dont il aurait eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions. » Il n’est point question de la presse… La protection en matière de discrimination (L. 1132-1 du Code du travail) ou de harcèlement (L. 1152-2/L. 1153-2 du Code du travail) est dans le même esprit de compétence des autorités judiciaires ou administratives et point des médias.

En conclusion, ce n’est pas « Le Roi » qui se retrouve échec et mat dans cette partie d’échec entre un syndicaliste et l’entreprise, mais le syndicaliste dont la conduite fait perdre toute considération à sa démarche.

Les limites des critiques contre l’employeur [1]

Source : https://www.flickr.com/photos/pedrosimoes7/19440874241

Mais derrière cette affaire ce sont bien les processus internes de l’entreprise qui sont en cause car ils ont conduit à un litige coûteux tant financièrement que pour la réputation d’une entreprise et de son management.

ARTICLES DU CODE DU TRAVAIL

Article L. 1161-1. du Code du travail – Aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir relaté ou témoigné, de bonne foi, soit à son employeur, soit aux autorités judiciaires ou administratives, de faits de corruption dont il aurait eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions.

Article L. 1132-1 du Code du travail – Aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, au sens de l’article L. 3221-3, de mesures d’intéressement ou de distribution d’actions, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses mœurs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap.

Article L. 1152-2 du Code du travail – Aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.

Article L. 1153-2 du Code du travail – Aucun salarié, aucun candidat à un recrutement, à un stage ou à une période de formation en entreprise ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements de harcèlement sexuel.

Aller sur le blog de Mourad Gahzli  [2]